La broderie de Madère est une véritable représentation de l'excellence, de la tradition et de l'art. Elle a une riche histoire qui remonte au XVème siècle, lorsque Madère a été colonisée pour la première fois. Au fil des siècles, elle est devenue l'une des images de marque les plus reconnaissables de Madère, connue pour ses détails complexes et son identité unique.
La broderie fait partie de la culture et de l'histoire du peuple madérien. Alors que l'artisanat d'origine était réservé à la consommation personnelle, cette forme d'art extrêmement détaillée, réalisée à la main, se retrouve aujourd'hui dans le monde entier sous de nombreuses formes différentes, du linge de lit aux maisons de couture. La broderie devenait une source de revenus pour les femmes qui, en plus de leurs tâches quotidiennes à la maison, travaillaient sur des œuvres d'art authentiques. Le processus a très peu changé au fil des décennies. Une visite au Bordal donne un aperçu des traditions et des compétences qui permettent encore de produire des travaux d'aiguille de la plus haute qualité.
Mon mari et moi avons réservé une visite guidée de l'usine Bordal dans le centre de Funchal. Passionnée de mode et de tissus, j'ai été très intéressée par ce processus et par le produit fini. Je savais également que l'usine Bordal avait été chargée de créer des cols en dentelle pour une collection de Chanel. Cela démontre clairement la haute estime du travail de Bordal. Mon mari a été plus difficile à convaincre, je dois dire, mais il s'est vite laissé séduire par la passion qui anime les employés de Bordal.
Une fois arrivé au bâtiment historique de Bordal, situé sur la Rua Fernão Ornelas - l'une des principales rues piétonnes dédiées au commerce à Funchal -, vous serez accueilli à la porte par une dame vêtue d'un costume folklorique traditionnel de Madère, qui effectue des travaux à l'aiguille. En montant la première cage d'escalier, on a immédiatement l'impression de remonter dans le temps, et, bien évidemment, les grandes fenêtres sont ornées de magnifiques rideaux de dentelle. Nous avons été conduits au deuxième étage pour attendre le début de la visite. La boutique présentait un large éventail d'articles brodés, des nappes aux vêtements en passant par le linge de lit. Et même à une certaine distance, les détails complexes de la broderie étaient largement visibles.
Notre guide était une charmante dame parlant très bien anglais et très accueillante. Nous avons d'abord appris la longue histoire de la broderie de Madère, comment elle est devenue une source importante de revenus pour ces familles et comment les femmes des villages créaient, et créent encore, des broderies artisanales chez elles, après avoir reçu les instructions et les patrons.
Comprendre comment un objet est fabriqué permet de mieux apprécier une forme d'art. Le temps, les efforts et les compétences requises pour chaque pièce sont incroyables et vraiment inspirants. Mon mari était finalement absorbé par la visite et allait bientôt s'essayer, tout comme moi, aux travaux d'aiguille. Cependant, nous avons rapidement réalisé à quel point cela est difficile. Et je pense que si nous étions restés trop longtemps seuls avec une aiguille, nous aurions causé des dégâts !
Nous pensions découvrir l'évolution de la fabrication des vêtements brodés au fil du temps. Mais je dois dire qu'il était agréable de constater que ce savoir-faire dépendait de la capacité des femmes à créer ces chefs-d'œuvre en utilisant des techniques ancestrales qui avaient été transmises de génération en génération au sein des familles. Très peu de machines sont utilisées et les seules machines « modernes » visibles étaient les machines à laver et les fers à repasser ! C'était si agréable de voir une industrie épargnée par l'automatisation.
Outre les travaux d'aiguille, le troisième étage de Bordal abrite une partie du travail manuel qui consiste à laver et à repasser chaque pièce avant qu'elle ne soit considérée comme terminée. Ces femmes semblaient heureuses de travailler toutes ensemble et l'environnement de l'équipe était à son avantage.
Si la production du début à la fin est impressionnante, c'est le début du processus qui nous a le plus fasciné. Une fois l'œuvre créée, son prix est calculé à l'aide d'un appareil semblable à une montre, appelé curvimètre, qui calcule le nombre de points nécessaires en roulant sur la feuille de patron. Le prix est calculé sur la base de ce nombre.
Ensuite, la machine à perforer, qui ressemble à un stylo à plume, est déplacée sur la feuille de patron (comme du papier sulfurisé), effectuant des perforations qui sont ensuite estampillées sur les tissus et prêtes à être suivies par la brodeuse. Le processus de perforation est si délicat qu'il nécessite des années de pratique. Dans le cadre de la visite, vous verrez de près tout ce que j'ai décrit, et je suis sûre que vous serez tout aussi impressionnés que nous l'avons été.
Mon mari et moi parlons encore de notre visite à Bordal. Nous avons tous deux été très impressionnés par le dévouement et la passion des travailleurs de l'usine.
Le plus surprenant est qu'en 1940, il y avait 50 000 brodeurs, alors qu'aujourd'hui, leur nombre est inférieur à 1000. Il est évidemment triste de constater un déclin important de la main-d'œuvre, cependant, il est très réconfortant de témoigner que l'entreprise prospère toujours au cœur de Funchal, chez Bordal. J'espère vraiment que cette tradition se perpétuera. En visitant l'atelier de Bordal, vous soutenez les traditions de l'île et assurez la pérennité de ce précieux savoir-faire. Vous ne pouvez pas quitter l'usine Bordal sans faire un petit achat dans le magasin. À ce moment-là, mon mari m'a laissé diriger les opérations. Heureusement pour lui, je n'ai pas trouvé le chemisier Chanel !
Nous avons remarqué que le personnel était visiblement passionné par la production de broderie de Madère. C'est la passion des familles madériennes dans les villages ruraux qui continuera à maintenir ces traditions de longue date et à fabriquer des produits avec amour. Nous remercions tous les travailleurs de Bordal, non seulement pour les compétences incroyables qu'ils ont démontrées, mais aussi pour l'accueil dont ils ont fait preuve en nous présentant une grande partie de l'histoire de Madère.
Tracy Sullivan
